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Christophe Berthemin et Romain Basset, réalisateurs de Remy

Aujourd’hui, je vous propose de faire plus ample connaissance avec un duo de jeunes réalisateurs très prometteurs : Romain Basset et Christophe Berthemin.

Romain Basset et Christophe Berthemin

Pouvez-vous vous présenter ?

Romain Basset : J’ai 25 ans, j’ai fait pas mal d’études supérieures en sciences et depuis 2005 j’écris et réalise des courts-métrages, la plupart ancrés dans le cinéma de genre.
Christophe Berthemin : Après un Bac L option ciné, j’ai obtenu une Maîtrise Arts du Spectacle à l’IECA (Institut Européen de Cinéma et d’Audiovisuel) de Nancy, où j’habite toujours. Depuis, je pige pas mal sur des articles ciné pour plusieurs supports et l’an dernier, j’ai co-réalisé avec Romain Basset le court-métrage “Rémy”. Je démarche actuellement plusieurs scénars de longs…

A l’instar de Benjamin Rocher et Yannick Dahan, RÉMY, a été réalisé à quatre mains. Quel a été la genèse de ce projet ?

RB & CB : Alors la rencontre, très classiquement, via Myspace !
RB : Il y a presque deux ans de ça aujourd’hui. J’avais croisé Trent sur le net et j’étais assez impressionné par son travail de journaliste et ses goûts en cinéma hyper éclectiques. On a donc convenu d’un rencard sur Nancy alors que j’y étais de passage. Et nous avons tout de suite accroché, que ce soit au niveau du cinéma que l’on aime voir ou de celui qu’on aimerait faire… On s’est dit alors que ce serait cool de faire quelque chose ensemble.
CB : Plus tard, Romain m’a fait parvenir le scénar de RÉMY, écrit par son ami Laurent Mizrahi, et on s’est dit que ce serait pas mal de se faire la main dessus avant MARELLE pour voir si le courant passait entre nous sur un set et parce que dans les deux cas, il était question d’enfant et de thèmes qui nous touchaient.
RB : Le truc c’est que MARELLE exigeait un tournage avec une classe entière d’enfants d’une dizaine d’années. Nous nous sommes alors dit que ce serait intéressant de réaliser un court-métrage beaucoup plus modeste, impliquant la direction d’un ou plusieurs enfants, en parallèle des démarches de développement de MARELLE.
CB : Finalement, pendant le tournage de Rémy, j’ai eu un coup de fil du producteur de Marelle qui m’annonçait que la région Lorraine n’avait pas accepté de suivre le projet et donc, MARELLE est tombé à l’eau. Bravo la Lorraine !! Dommage, l’actrice Catriona McColl nous avait donné son accord et en fans de Lucio Fulci, on avait hâte de travailler avec elle.


Sur le tournage de Rémy avec Roger Trapp et Ugo Le Cornec

Sur le tournage comment a fonctionné votre binôme ?

RB : Pour le fonctionnement de notre binôme, c’est surtout beaucoup de prépa en amont, il fallait se ré-approprier complètement le scénario, maîtriser l’un et l’autre le rythme des séquences afin de travailler de façon parfaitement autonome… Il s’agissait avant tout de s’assurer que nous partagions la même sensibilité pour le film, que nous souhaitions lui donner la même ambiance, la même couleur… En un mot, il était impératif que nous soyons sûr de vouloir faire le même film tous les deux… D’où de longues conversations téléphoniques passionnées tous les soirs !
CB : C’était mon premier court donc Romain, qui avait déjà réalisé, a plus pris certaines choses en main que moi, m’évitant ainsi des erreurs que j’aurai pu faire seul. A côté de ça, c’est un énorme gain de temps sur un set dans le sens où c’est une répartition évidente des tâches quand on sait qu’on va dans la même direction. Surtout quand tu as peu de temps comme c’était le cas sur RÉMY qui a été tourné en deux jours dans plusieurs endroits de Paris (St Germain des Près, Bastille et Ségur). Mais plus que le travail de deux réas, c’est vraiment la motivation de tout le monde qui a permis au projet d’exister.

RÉMY  a-t-il participé à des festivals ces derniers mois ?

RB : Franchement, je suis assez déçu de l’accueil que les festivals réservent au film. Nous avons de bons retours, des choses très positives sur l’émotion qui s’en dégage et la qualité visuelle du métrage mais trop peu de sélections. J’en profiterais donc pour remercier l’Étrange Festival de Lyon ainsi que Gérard Pirès et son jury pour la sélection du film au Forum des Jeunes Réalisateurs 2008. Apparemment, si j’ai bien compris, la concurrence est rude dans le domaine du conte dramatique transgénérationnel…
CB : On a eu la chance que RÉMY soit Lauréat au Forum des Jeunes Réalisateurs fin 2008 alors qu’il n’était même pas encore dans sa version définitive. Je remercie donc encore Gérard Pirès et son jury. En tout cas, ça nous a ouvert quelques portes puisque 2C Associés, qui s’occupe du Forum, nous a invité au Festival de la Pub de Méribel pour rencontrer certaines boîtes de pub, et l’a ensuite diffusé dans d’autres Festivals, au Liban et en Chine. Récemment, le court était aussi en compétition à L’Étrange Festival de Lyon et a été diffusé à Paris à un hommage à l’un des comédiens de RÉMY, Roger Trapp, que lui rendaient ses amis Pierre Etaix et Hervé Ganem. Malheureusement, le producteur de RÉMY ne s’est absolument pas occupé du court, le tuant ainsi dans l’œuf, et on a du tout faire nous-mêmes, ce qui n’est pas toujours évident. Alors pour les retours, je te dirai ça si un producteur (un autre, un vrai, pas en mousse !) nous passe prochainement un coup de fil.

Christophe, tu as collaboré avec Dédo du JAMEL COMEDY CLUB sur un court métrage en tant que scénariste ?

CB : Oui, effectivement, j’ai écrit le pilote de ZÉMOTIONS pour Dédo et il a été réalisé par Alex Carvalho du collectif Extermitent Prod. Il a été diffusé en partie en fin d’année 2008 sur TF1 dans l’émission Watcast. On partage avec Dédo le goût d’un même cinéma et c’est sûrement pour ça qu’on s’est d’ailleurs rencontrés au Festival Fantastic’Arts il y a quelques années. Avec ZÉMOTIONS, j’avais envie de m’amuser avec les incidences d’une mauvaise gestion d’entreprise qu’est le corps sur la personne à qui il appartient. Ça permet dans la narration et à l’écran d’excuser tous les excès. Ça vient sûrement de mon amour pour des films comme L’AVENTURE INTÉRIEURE ou LE VOYAGE FANTASTIQUE, ou alors d’une overdose scolaire dIL ÉTAIT UNE FOIS LA VIE. En tout cas, pas mal d’autres épisodes sont déjà écrits mais pas encore de quoi faire une saison complète donc on va voir comment ça va évoluer. D’autant plus que Dédo a une actu bien chargée en ce moment entre son spectacle solo, que je recommande à tout le monde, et plusieurs autres séries.


Zemotions avec Dédo

Tu étais également chanteur d’un groupe de rock, TAWN, qui s’est dissout en 2008. Quelle a été la raison de cette dissolution ? Comptes-tu revenir à la musique ou tu préfères te consacrer à l’écriture, aux interviews et au cinéma ?

CB : La raison de la dissolution, c’est qu’on a jamais eu de plan de carrière et qu’on a toujours voulu s’amuser sans vraiment chercher à joindre l’utile à l’agréable, pour privilégier l’agréable. TAWN a tenu douze ans, j’en ai 31, donc quand on a commencé, on était des gosses avec des rêves et en grandissant, tu t’aperçois que les rêves, ça se partage pas tant que ça… même si certains y arrivent. Je pense que lorsque la scène me manquera à nouveau, je remonterai un projet avec des potes. Ce sera encore plus rock, plus primaire, plus fun et l’occasion de refaire des plans pourris dans des cafés concerts sympas à grand renfort de whisky bon marché. L’avantage avec l’écriture est purement égoïste, c’est que je n’ai pas à me freiner dans mes envies et mes angoisses parce que je déteste les concessions. Et plus surprenant, j’ai maintenant plus facilité à écrire des scenarii de cent pages que des paroles de vingt lignes. Au final, le groupe restera une aventure humaine que je n’oublierai pas car ça m’a construit humainement et je suis fier d’avoir appartenu à cette scène musicale et d’avoir fait plein de vraies rencontres. La musique m’a apporté une notion de rythme qui m’aide encore beaucoup dans l’écriture. Et puis, c’est le bassiste de TAWN, Benjamin Cahen, qui a composé le score de RÉMY, donc rien ne se perd, rien ne se créé…

Romain, quel est le projet sur lequel tu as pris le plus de plaisir ?

RB : Lorsqu’il s’agit de “faire”, de l’écriture au tournage en passant par la préparation, je dirais que je ressens le même plaisir à chaque fois, la même effervescence fébrile. C’est bien pour cette raison que je tiens à en faire ma vie… Après, je ne dis pas que je suis également satisfait de mes films !


Filmographie de Romain Basset

Vos  influences ?
RB : Difficile à dire. Rejetant à la base l’idée même de “fan film”, je dirais que mes influences sont inconscientes, je ne me dis jamais : “tiens, on va essayer de refaire un plan comme dans ce film là, c’était mortel !”. Si c’est ce que tu veux savoir, il y a bien un cinéma que je préfère (bien que je sois friand a priori), le cinéma de genre, de préférence fantastique et/ou horrifique parce que c’est celui qui donne le plus de liberté à l’image de par son pouvoir métaphorique. Dans un film d’horreur, l’image est reine, elle contient tout : de l’émotion primordiale au sous texte s’il y en a un. J’aime beaucoup lorsque la forme prend le pas sur le fond, voire l’englobe carrément… Un peu comme dans les romans de Bret Easton Ellis. C’est un peu le but de tout médium d’ailleurs, je pense.

Vos films préférés ?

RB : Histoire de poursuivre la question précédente : j’adore Bava et Argento, le cinéma horrifique du début des années 80’s. Carpenter est mon maître absolu… Sinon, au top du top de ma liste : HEAT, SUSPIRIA, HALLOWEEN, ROCKY, DONNIE DARKO, AMERICAN BEAUTY, également, CARLITO’S WAY…
CB : Je pense avoir une cinéphilie super éclatée et j’aime autant les films des Charlots que l’expressionnisme allemand. Une partie de moi est restée enfermée dans les années 80 parce que c’est ma génération et je peux donc regarder en boucle les films de John Carpenter à ceux de John Hugues en passant par ceux de Joe Dante. Après, comme ça, de tête, là je pense à PHANTOM OF PARADISE, LES GUERRIERS DE LA NUIT, LE LOCATAIRE, CANICULE, PEUR SUR LA VILLE, STAND BY ME, FREAKS, PARADIS POUR TOUS, LE CHAT, LES DENTS DE LA MER ou SUSPIRIA. Mais si tu me redemandes dans une heure, je te dirai sûrement d’autres choses. En tout cas, mon dernier coup de cœur reste ANTICHRIST de Von Trier.

Que pensez-vous du cinéma de genre made in France ?

RB : Ce qu’est en train de faire la boîte de production Sombrero est extrêmement intelligent. Leurs films sont bons. Honnêtes et humains. Ce sont les qualités primordiales. Malheureusement, ils ne semblent pas vouloir poursuivre l’aventure du cinéma de genre et ne réclament plus que de cette satanée comédie à tire larigot… “A l’intérieur” est également un vrai coup de cœur, une putain de réussite. L’alchimie entre la lumière de Laurent Barès et le score de F-E Chanfrault est imparable !
CB : Je n’arrive pas à réfléchir en terme de “genre”, mais plutôt de sincérité et de jusqu’au-boutisme. Et c’est vrai que le cinéma dit “de genre” est souvent le mieux placé pour ça parce qu’il pousse les situations à leur paroxysme. On commence à avoir des gens avec cette sincérité évidente dans le ciné qui vont devenir de vrais grands réals parce que ce sont des passionnés et que ça se lit jusque dans leur regard, comme Pascal Laugier ou Fabrice Du Welz. Ça reste juste dommage qu’on soit encore dans un pays qui voit le genre comme quelque chose de marginal alors que ça permet de raconter les plus belles histoires d’amour qui soient. Et ça, certains l’ont compris, comme La Fabrique de Films, Sombrero ou Wild Bunch. Mais tant que la plupart des producteurs n’auront pas fait le deuil de la Nouvelle Vague, et que le public plébiscitera des comédies régionalistes ou des biopics pompeux, le cinéma plus viscéral aura du mal à exister. Une franchise à la SAW, c’est inimaginable ici. Heureusement, du côté du polar, ça s’ouvre un peu et l’an dernier, des films comme SECRET DÉFENSE et POUR ELLE m’ont agréablement surpris. Sinon, j’ai raté le De Van que je voulais voir parce que j’ai beaucoup aimé DANS MA PEAU. J’irai voir cette semaine en salles VERTIGE et j’ai hâte de voir les prochains films de genre comme LA MEUTE, réalisé par un de mes anciens camarades de classe. Dans un autre registre, j’ai vraiment envie de voir le PIRANHAS d’Aja parce que sang, seins, 3D et Elisabeth Shue est une recette qui me plait et que c’est quand même un réalisateur made in France. Si la 3D arrivait un jour en France, ce serait pour filmer Paris sous tous ses angles en version carte postale, avec Honoré ou Klapisch aux commandes et Mélanie Laurent et Louis Garrel devant la caméra, donc je peux m’en passer. En français, j’attends beaucoup le docu sur le tournage de L’ENFER d’Henri-Georges Clouzot qui sort en novembre. Les bouts d’essais de Clouzot sur Romy Schneider sont parmi les plus belles images que j’ai pu voir sur un écran donc j’ai hâte d’en découvrir plein d’autres.

En dehors du cinéma, quelles sont les choses qui vous passionnent ?

RB : “En dehors du cinéma”… Qu’est-ce que tu entends par là ? Un barbecue ? Une partie de football ?… Nan, sérieusement, la plupart des choses qui m’intéressent se trouvent dans le ciné. L’art en général. Qu’il s’agisse de littérature, peinture, musique, etc. Ouais, voilà, j’aime beaucoup la musique, du néo-métal à la Trance israélienne… En dehors de ça, j’avoue, y a pas grand-chose, si ce n’est causer de tout ça autour d’une bière avec des potes.
CB : Comme tout le monde, violer des enfants morts et le twirling bâton. Non, en règle générale, quand tu aimes le ciné, tu es passionné par tout ce qui te passe à travers l’œil. A côté de ça, rester en vie doit être une passion aussi puisque je continue à le faire. Sinon, ma famille, mes amis, l’Art et avoir cinq sens qui fonctionnent, je crois que c’est ça qui me passionne.

Internet est un formidable outil de promotion et de rencontres. J’ai vu que vous aviez rejoint notamment le réseau Twitter, vos premières impressions ?

RB : IN-DIS-PEN-SA-BLE !!!
CB : Je suis très mauvais en informatique mais vu que je suis souvent sur l’ordi car j’ai toujours un scénar d’ouvert, ma curiosité me pousse parfois à passer des heures à lire des articles ou regarder des vidéos dans ce Tout L’Univers sans limites qu’est le Net. D’autant plus que je n’ai pas la télé, donc je choisis mon actualité. Sinon, j’ai effectivement crée un Twitter parce que pas mal de boîtes de films y sont, ça me tient au courant de leur actu, et de prévenir lorsque des articles à moi sont en ligne. Je n’y vais vraiment pas beaucoup mais comme lecteur, je suis sûr que ça peut être amusant d’y suivre le journal de bord d’un tournage en quelques mots par jour, par exemple. C’est peut-être ça le futur de l’épistolaire. Pour l’instant, je pense que c’est surtout un gadget de stars pour faire taire des rumeurs. D’ailleurs, si Michael Jackson en avait eu un il y a longtemps, il aurait éventuellement pu dire qu’il n’avait jamais touché le jeune Jordan Chandler, plutôt que ce gamin avoue aujourd’hui comme si de rien n’était qu’il avait été forcé à mentir par son père, pour l’argent. Je souhaite donc à Michael Jackson de bien se reposer au Paradis et à Papa Chandler de crever en Enfer…


L’équipe de Rémy

Des projets ?

RB : J’en ai plein ! Un long-métrage, TOUTES LES NUITS, dont je termine le traitement actuellement (avec, peut-être, bientôt une grosse nouvelle à la clé !). DEBOUT, un projet (court ou long, je ne sais pas encore) de conte macabre à la Del Toro mettant en scène un enfant qui part à la recherche d’une nouvelle maman dans un cimetière… Il s’agit de l’adaptation de la pièce éponyme (incroyable !) de Nathalie Papin. Également, un court-métrage de docu-fiction cet automne, à la croisée de l’univers visuel rural de Depardon et des écrits d’Henry David Thoreau…
CB : Justement, je suis en train de finir un scénario de long, une comédie, quasi comédie romantique par moments, qui se passe dans le milieu du rock, ça s’appelle LARSEN. Sinon, là, dans l’heure, continuer des articles pour le nouveau site Frenetic Arts et pour le mien, L’Art7. Et toujours de l’écriture pour certains mags. A côté de ça, j’ai passé plusieurs années à ne faire qu’écrire des scenarii de longs donc j’en ai terminé pas mal maintenant, dans divers genres, et je suis déjà en train d’en attaquer d’autres. Je suis dans une phase de démarchage auprès de certaines prods et on verra ce que ça donne. J’attends des réponses. C’est sûr que s’ils attendent du “Bienvenue chez les Basques”, je pense que je peux déjà aller me faire mettre. Entre temps, je referai peut-être un court car j’ai un projet qui traîne depuis un bail avec Coralie Trinh-Thi que j’aimerai bien faire. Donc, on verra ça. Tenir bon, c’est déjà tout un projet.

3 comments

  1. je viens de visionner “Rémy”, c’est beau!!! félicitations à vous messieurs!

  2. Une interview passionnante, avec des passionnés , que demander de plus ^^
    May the force be with you les mecs 😉

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